— Je suis certain que vous pourriez en tirer au moins dix mille livres...
Un soupçon atroce traversa l'esprit d'Imogène : Ross ne lui aurait-il fait la cour que dans l'espoir de la convaincre de réussir cette affaire répugnante ?
— Cessez cette plaisanterie, Gowàn, elfe n'est pas drôle!
— Moi, je la trouve amusante.
Le ton nouveau de son compagnon la fit frissonner. Qu'est-ce que cela signifiait ? Elle avait quelque peu perdu de son assurance quand elle demanda :
— Je ne comprends pas votre attitude, Gowan ?
— Je le regrette, Imogène, mais je pense que nous nous sommes assez amusés ; maintenant, il s'agit de passer aux choses sérieuses.
Sous les yeux horrifiés de miss McCarthery, une véritable métamorphose s'accomplissait en la personne de Ross. Fini le petit bonhomme rondouillard et timide, rougissant pour un rien, au regard de gosse. Elle voyait en face d'elle un homme pas très grand mais dont l'épaisseur donnait l'impression d'un bloc dur que l'éclat métallique des yeux rendait inquiétant. Elle voulut lutter contre la panique oui l'empoignait et se leva. Raffermissant sa voix, elle cria plutôt qu'elle ne dit :
— Gowan Ross, je vous prie de me ramener à Callander !
Il se leva à son tour.
— Ne vous fâchez pas, Imogène, et écoutez-moi.
— Si c'est encore pour me parler de votre stupide proposition, vous feriez aussi bien de vous taire, sinon...
— Sinon ?
— Sinon, je reprends ma parole !
Il éclata d'un rire affreusement vulgaire et miss McCarthery devina qu'elle ne serait pas plus Mrs Ross qu'elle n'aurait été Mrs Lyndsay. Elle voulut couper court à toute explication pour ne pas entendre ce qu'elle redoutait. Mais pour s'en aller, il lui fallait passer à côté de Gowan.
— Restez où vous êtes, miss ! Il me faut les documents que vous portez sur vous et quand je devrais les prendre moi-même, je les aurai !